Chapitre 1 - Genèse de la DCA française
Plan
1) Problématique du tir antiaérien par arme à feu.
2) Une situation tactique nouvelle.
3) L’état des adversaires.
31) Les Forces aériennes,
32) Des procédés de lutte antiaérienne improvisés.
4) Les premières mesures d’organisation (1915-1916),
41) Formation des spécialistes antiaériens dans l’Artillerie,
42) Problème de l’identification des aéronefs,
43) Missions et utilisation des moyens disponibles,
44) Structuration de la défense contre les aéronefs.
Une annexe.
1) Problématique du tir antiaérien par arme à feu
Lorsqu’il commence à apparaître que l’aéronef piloté peut devenir une machine de guerre, le tir contre un objectif mobile n’est pas une nouveauté absolue mais c’est la première fois qu’on va devoir le pratiquer contre un engin qui non seulement se déplace en l’air mais surtout - cas de l’avion - y évolue avec agilité et à une vitesse très importante pour l’époque.
Donc, que ce soit contre un dirigeable ou un avion, il va falloir viser sur cet objectif et, comme à la chasse, tirer efficacement devant lui pour essayer de l’atteindre et de le "descendre".
Pour ce faire, on ne dispose évidemment que des armes à tir tendu en dotation : canons d’artillerie "classique", mitrailleuses. On peut donc penser soit à les utiliser en grand nombre pour tenter de créer devant l’appareil une sorte de rideau d’acier soit donner à des armes existantes dont la balistique est jugée appropriée (grande vitesse du projectile, trajectoire très tendue) une forte capacité d’atteinte unitaire.
Pour réussir son tir, une telle arme devrait posséder des caractéristiques très particulières :
Une configuration mécanique permettant le tir aux grands angles de site (adaptation de la masse oscillante, chargement possible à forte inclinaison, freinage renforcé de la masse reculante),
Une circulaire permettant le tir omnidirectionnel ou dans un très large secteur (adaptation de la masse pivotante),
Et, idéalement, pouvoir tirer par rafale.
Il est aussi nécessaire d’effectuer un pointage précis et continu sur les cibles et, pour préparer le tir, de déterminer avec autant de précision que possible les éléments qui dimensionnent la « correction-but » ou « extrapolation » à appliquer :
Leur distance, d’où fixation de la hausse, de la durée de trajet (pour utiliser et régler des fusées chronométriques),
Leur dynamique, en acceptant l’hypothèse simplificatrice que pendant toute la séquence de poursuite et de tir, l’aéronef évolue à vitesse constante sur une trajectoire rectiligne (vecteur vitesse constant).
Ces notions d’artillerie antiaérienne - qui sont devenues aujourd’hui élémentaires - n’étaient pas encore connues et encore moins évidentes.
2) UNE SITUATION TACTIQUE NOUVELLE
À la veille de la « Grande Guerre » et dans tous les pays, la lutte contre les aéronefs en est à ses balbutiements : d’une part il y a peu de dirigeables, et l’avion n’est apparu que quelques années seulement auparavant et son utilisation à des fins militaires n’est pas répandue. Les premières missions militaires envisagées pour ces aéronefs sont les mêmes : reconnaissance et réglage des tirs d’artillerie, bombardement sommaire.
La guerre italo-turque est le théâtre de la première utilisation militaire de l’aviation : le 23/10/1911, un pilote d’avion italien (le capitaine Carlo Piazza) survole les lignes turques pour une mission de reconnaissance ; le 1/11/1911, la première bombe provenant d’un avion tombe sur les troupes turques en Libye. Le 10/9/1912, un monoplan Nieuport est le premier avion abattu au combat, descendu par une batterie de mitrailleuses.
Afin d’empêcher et de contrer par les mêmes moyens les actions aériennes adverses, apparaissent alors les premiers avions « de chasse » et ce n’est que le 5/10/1914 que l’on enregistre le premier combat aérien. [1]
Déjà, si l’on pressent que l’avion va trouver avec son homologue un adversaire à sa mesure, il n’en est pas de même pour lutter contre les dirigeables qui sont capables d’évoluer à de hautes altitudes (entre 3.000 et 4.000 mètres) : selon les modèles d’avions, il faut à ceux-ci entre quinze et trente minutes pour atteindre de telles hauteurs, alors qu’un projectile tiré par un canon antiaérien le fait en quelques secondes. Cet état de fait justifie à lui seul les premiers développements des armements de DCA (défense contre les aéronefs).
En France, l’engouement pour les aéronefs a déjà incité les artilleurs à réfléchir aux moyens de défense appropriés à combattre ce type de menace. Le 22/4/1900, le lieutenant-colonel Sainte-Claire-Deville [2], directeur de la Section Technique de l’Artillerie, adresse au Ministre de la Guerre une note sur un "programme de recherche des moyens d’attaquer les dirigeables". Des études ad hoc sont entreprises en 1904, sous la direction du Comité de l’artillerie.
En 1906, la Section Technique de l’Artillerie demande que des expériences soient rapidement effectuées dans le but de définir un canon et un obus qui seraient efficaces contre les aéronefs.
Des tirs sont effectués, l’année suivante, au camp de Mailly (Aube) avec un canon de 75 modèle 97 monté sur un affût de campagne et sur un affût de défense côtière, affûts qui ont été modifiés par l’Atelier de construction de Bourges. Leur résultat est significatif : cette arme possède bien les qualités balistiques requises pour la lutte antiaérienne mais elle ne peut aucunement y réussir, en raison de la limitation de son domaine de tir en direction et en site. Disposer d’un matériel spécifique s’avère donc indispensable.
Le 1/5/1908, le Comité de l’Artillerie examine avec intérêt une proposition d’autocanon antiaérien, présentée par Sainte-Claire-Deville qui est devenu directeur de l’Arsenal (Atelier de Construction) de Lyon ; ce document fait suite aux travaux d’études du capitaine Houberdon.
Le 6/6/1908, l’exécution de ce projet est confiée à l’Atelier de construction de Puteaux par l’Inspection permanente des Fabrications d’Artillerie. Les premières présentations du matériel ainsi réalisé ont eu lieu en 1910 au camp de Chalons, ainsi que celles d’autres armes antiaériennes et dispositifs (canons de 37mm et 47mm, affût permettant le tir vertical des mitrailleuses). Des tirs d’expérimentation sont effectués à Toulon et à Calais, dont les résultats sont jugés satisfaisants.
C’est ce qui conduit à l’adoption de ce matériel en 1913 sous le vocable "d’autocanon de 75 mm modèle 1913" ; une commande de 30 exemplaires en est passée à l’Atelier de Puteaux.
Pour sa part, dès 1910, le capitaine Pagezy [3]a publié un ouvrage visionnaire traitant du tir contre les aéronefs.
3) L’ÉTAT DES ADVERSAIRES en 1914
31) Les Forces aériennes
Lorsque le conflit éclate en août 1914, les parcs aéronautiques des adversaires sont déjà importants :
En France : 23 escadrilles de 6 avions, 12 dirigeables.
En Allemagne : 34 escadrilles de campagne de 6 avions, 7 escadrilles de place de 4 avions et 7 Zeppelins.
Le rôle des aéronefs n’est pas conçu de la même façon de part et d’autre du Rhin. En France, leur emploi n’est envisagé que pour la Reconnaissance. En Allemagne, leur utilisation inclut le bombardement aérien, ce qui se concrétise dès le début de la guerre puisque, le 3 août 1914 à 17h22, un avion allemand largue six bombes sur Lunéville ; le 30 août, c’est un Taube qui jette cinq bombes sur Paris.
Le premier duel aérien de l’Histoire de l’aviation a lieu le 5 octobre 1914, tout près de Reims ; il est remporté par Joseph Frantz, pilote français d’un appareil Voisin de l’escadrille V 24 qui abat un Aviatik allemand.
32) Des procédés de lutte antiaérienne improvisés
La fabrication en (petite) série de l’autocanon de 75 mm modèle 1913 prend du temps et il n’en existe qu’un seul exemplaire à la déclaration de la guerre. Il équipe la première pièce d’autocanon commandée par le lieutenant Lange, affectée administrativement au 10ème Régiment d’artillerie (Rennes) et préposée à la défense du Grand Quartier Général, à Vitry-le-François. Une seconde pièce la rejoint le 25 août, pour former la première section d’autocanons placée sous les ordres du capitaine Paris.
À l’ouverture des hostilités, il n’y a donc pas vraiment de moyens antiaériens spécialisés de DCA et, pendant les premiers mois de guerre, les artilleurs inventent des solutions de fortune : des pièces de 75 sont montées sur des arbres ou sur leur caisson à munition, des circulaires de pointage ou des plates-formes de circonstance sont aménagées.
Ces divers dispositifs sont nocifs pour le frein de tir du canon de 75 qui n’est pas conçu pour tirer à site élevé. De plus, ils sont peu efficaces bien que deux Zeppelin soient abattus par des français, le 22 août 1914 [4].
Aux armées, le tir contre les aéronefs s’effectue aussi avec les armes d’infanterie, par section de mitrailleuses tirant « en tenaille ». Or, dès que les troupes voient un dirigeable, elles ont tendance à ouvrir le feu sans se soucier de son identification préalable. Aussi, dès octobre 1914, ce type de tir est-il interdit chez les Français et les artilleurs restent alors les seuls à devoir lutter depuis le sol contre les aéronefs.
Avec l’autocanon, la méthode de « pointage par éclatements » est préconisée :
Un premier coup avec obus fusant est tiré sur des éléments de tir estimés.
L’écart entre le point d’éclatement et l’aéronef est apprécié grâce à la lunette de visée qui peut être décalée par rapport au plan de tir.
Pour tirer le coup suivant, on introduit une correction égale à l’écart mesuré.
Cette méthode erronée donne logiquement de très mauvais résultats et elle est rapidement abandonnée.
4) LES PREMIERES MESURES D’ORGANISATION (1915-1916)
41) Formation des spécialistes antiaériens dans l’Artillerie
Une fois le front stabilisé, il devient possible de prendre des mesures d’organisation des moyens et de formation de personnels. La spécialisation dans le domaine antiaérien débute, effectuée dans l’Artillerie.
Pour appliquer les nouvelles méthodes de tir, il n’est plus possible de se contenter du personnel disparate du début de la guerre. L’artillerie peut dégager les premiers effectifs mais, progressivement et surtout après Verdun (1916), ce sont les inaptes de l’infanterie, de la cavalerie et de l’artillerie qui sont affectés à la DCA pour en satisfaire les besoins en personnel.
Avec les efforts de recherche, la formation des officiers est prise en compte à Arnouville-lès-Gonesse où, à l’instigation du capitaine Paris, le Centre d‘instruction du tir contre aéronefs est créé le 28/6/1915.
Cet organisme est chargé de l’instruction de tous les personnels spécialisés [5], qui sont appelés à servir les sections d’autocanons ou les postes de canons semi-fixes ; c’est là que ces petites unités y sont formées et il va assurer cette tâche jusqu’à la fin de la guerre.
L’activité du Centre a également pour effet d’aboutir à des résultats importants :
La publication, sous le timbre du Ministère de la Guerre, de l’Instruction provisoire du 24/12/1915 sur la conduite du tir du canon de 75 contre objectif aérien, qui est la reprise pure et simple d’un mémoire rédigé par le chef d’escadron Pagezy [6],
La diffusion du cours qui est professé par le capitaine Lévy et qui s’intitule : « Étude du tir contre objectifs aériens. Détermination des méthodes de tir ».
Le 21/12/1915 est institué, dans chaque Armée, un « Organe de surveillance et d’instruction des postes des DCA et des sections d’autocanons » dont la direction doit être confiée à un officier (de l’artillerie de DCA). Tous ces responsables doivent être formés spécialement à Arnouville.
Le 1/1/1916, la direction du Centre d’Arnouville est confiée au commandant Pagezy qui est également nommé à la présidence de la Commission d’études pratique du tir contre objectifs aériens. C’est là que ce nouveau chef, secondé par le lieutenant Riberolles (du 51°RA), établit les bases scientifiques du tir antiaérien.
Un autre officier français, le lieutenant de vaisseau Le Prieur [7], applique ses idées au tir contre aéronef et réalise, en 1916, un correcteur de tir antiaérien.
42) Le problème de l’identification des aéronefs
L’identification des aéronefs pose problème dès l’apparition des premiers dirigeables et avions au dessus du champ de bataille, la menace potentielle qu’ils créent entraînant des réactions incontrôlées d’autodéfense et des tirs fratricides.
Les moyens de reconnaissance des avions qui sont enseignés afin de distinguer les Français des Britanniques et des Allemands sont les suivants :
Les insignes (couleurs des cocardes et bandes tricolores, croix de Malte),
Le Son (« chaque moteur a un son qui lui est propre »),
Les formes : monoplan, biplan, présence de fuselage, place de l’hélice (à l’avant ou à l’arrière), nombre de roues, type de gouvernail, etc.
Déjà sont publiés des « carnets de silhouettes » [8].
43) Missions et utilisation des moyens
Le rôle confié à la DCA est encore loin d’être théorisé mais il apparait déjà qu’il convient de s’attaquer à l’aéronef (l’avion essentiellement) dans toutes ses missions potentielles :
Aux Armées, il s’agit d’abord d’interdire l’accès des lignes amies aux avions de reconnaissance adverses et de gêner les avions d’observation dans l’exécution de leurs missions de repérage d’objectifs et de réglage des tirs d’artillerie.
Sur les arrières des forces et à l’intérieur du territoire, la DCA doit s’opposer aux raids ennemis de bombardement, au profit des points sensibles (gares, dépôts de munitions, magasins d’approvisionnements, cantonnements, états-majors) et de la population civile.
Pour cela, et puisque l’avion possède un certain don d’ubiquité (alors que la DCA ne pourra être partout), on va chercher pragmatiquement à rendre aussi difficile que possible sa tâche, en échelonnant les pièces antiaériennes tout au long de la ligne de feu et en accumulant des canons dans les zones de forte activité terrestre et autour des points sensibles.
Mais tout d’abord, face à la menace, le recours à des installations de fortune permet d’essayer de tirer parti des canons de 75 mm existants. Cependant, même si on affecte certaines pièces à la défense contre les aéronefs, elles doivent rester capables d’effectuer en cas de nécessité des tirs sol-sol de barrage.
C’est le cas de la section de l’adjudant Picard [9] qui abat un avion allemand par un tir antiaérien de sa pièce de 75, au dessus des côtes de Meuse, le 19 avril 1915 (c’est vraisemblablement le premier avion abattu par un tir antiaérien français).
À partir de l’été 1915, les livraisons des matériels affectés aux Armées et à la Défense du territoire se produisent à cadence satisfaisante. Ce sont près de 500 canons de 75 spécialement conçus pour la lutte antiaérienne qui seront produits, complétés par un nombre important de mitrailleuses.
Ils seront répartis comme suit :
. Aux Armées, une soixantaine d’autocanons et trois cents pièces de 75 sur plates-formes "semi-fixes",
. Défense aérienne du territoire (DAT) :
Lors de l’arrivée aux Armées des premiers canons antiaériens, ceux-ci sont employés en ordre dispersé, seul ou par section de deux pièces ; en 1915, on décide qu’on affectera une section de DCA par Division. Puis les canons seront rassemblés par ensembles de 5 ou 6 pièces (qui constitueront les futures batteries), dépendant de Groupes ou de Groupements de circonstance.
La première section d’autocanons (commandée par le capitaine Paris) est affectée fin 1915 à la défense du Camp retranché de Paris ; elle est mise en position près du Dépôt d’artillerie d’Arnouville-lès-Gonesse qui peut ainsi en profiter pour assurer la formation de ce type d’unité. Avec la 6ème section qui vient d’être formée, elle est remise à la disposition des Armées le 3/3/1915, tandis que la 5ème section [11]lui succède pour la défense de la Capitale.
44) Structuration de la défense contre les aéronefs
En janvier 1916 est créée l’Inspection Technique de la DCA aux Armées, au sein de l’Inspection du Matériel d’Artillerie aux Armées ; elle est placée sous l’autorité de Sainte-Claire-Deville, qui est passé général. Ses attributions s’appliquent "au matériel, à l’organisation de la télémétrie et à l’application des méthodes de tir".
Le 1er octobre 1916 est prise une double décision. Elle institue des Commandants de DCA d’armée [12] et rattache administrativement toutes les formations d’artillerie antiaérienne existantes au Dépôt du 62° régiment d’artillerie (de campagne) de Saint-Cloud qui a été créé le 1/8/1916.
Le 12 septembre 1916, sort « L’instruction et l’organisation de la défense contre aéronefs », document réglementaire selon lequel la défense contre les aéronefs comprend :
Un service de surveillance chargé de l’observation et de la signalisation des mouvements de dirigeables et d’avions... » ; il comporte plusieurs composantes : un service d’écoute et un service de radiogoniométrie (qui sont équipés d’un certain nombre de poste de télégraphie sans fil), des postes d’observation affectés aux Armées, un réseau de postes de surveillance du territoire constitué par quatre lignes successives de postes de surveillance.
« Un service d’avertissement d’extinction permettant de réaliser en cas d’incursions nocturnes de dirigeables, l’extinction des lumières dans les parties intéressées du territoire.
Des défenses antiaériennes fixes ou mobiles affectés en permanence à la protection d’un certain nombre de villes et d’établissements.
Une réserve mobile d’organes de défense antiaérienne destinée à être dirigée sur les points non protégés qui seraient éventuellement menacés.
Des liaisons téléphoniques mettant en relations les services de surveillance et d’avertissement d’extinction avec les autorités chargées d’actionner les différentes organisations défensives et de faire procéder à l’extinction des lumières ... ».
A l’été 1916, à l’initiative du chef d’escadron Bons, on commence à organiser les postes semi-fixes en "Groupements". Mis d’abord en place au sein de la IV° armée, ceux-ci sont progressivement généralisés et prennent l’appellation de "Secteurs de défense contre avion" qui ne seront formellement institués qu’à l’automne 1917 (cf. annexe : Secteurs et Centres de défense). Cette structuration permet d’y obtenir la décentralisation et l’unité de commandement ; elle améliore considérablement la discipline de feu, l’application des méthodes de tir réglementaires et l’organisation de la logistique.
Des réserves mobiles sont constituées, formées de section d’autocanons et d’unités de projecteurs [13].
La DCA du territoire est organisée de la façon particulière. Les moyens antiaériens affectés à défense du territoire sont regroupés en 8 Centres de défense contre aéronefs ; les plus importants d’entre eux sont aussi dotés d’escadrilles de protection. Reliés téléphoniquement, on trouve :
des autorités de commandement,
des moyens de défense,
des lignes de surveillance éloignée (une série de postes d’écoute barrant le nord de la France) et rapprochée (postes de guet établis autour du point à défendre).
Dès le début 1916, une aviation de défense aérienne est affectée à cette tâche et pour son usage exclusif. C’est une flotte de l’ordre de 200 appareils, regroupés en escadrilles de 10 à 12 avions et dont une partie est apte au vol nocturne.
Le camp retranché de Paris dispose, à lui seul, de 80 de ces appareils dont 50 peuvent voler de nuit.
Tous les établissements et les villes de l’intérieur ne disposent évidemment pas d’une défense aérienne propre, faute de moyens. De Dunkerque à Belfort, ce sont les escadrilles des armées, réparties en secteurs, qui doivent prendre cette mission à leur compte.
[1] Le 5 octobre 1914, près de Reims, le premier combat aérien de l’Histoire se déroule au-dessus du point de jonction des communes de Jonchery-sur-Vesle, Prouilly et Muizon. Il est remporté par les français Frantz, pilote, et Quénaul, observateur, à bord d’un appareil Voisin III de l’escadrille V 24 et qui abattent un "Aviatik" allemand piloté par le lieutenant Von Zangen.
[2] Charles Etienne Sainte-Claire Deville (1857-1944 ; X 1876)
[3] Jules Emile Eugène Pagezy (1876-1939 ; polytechnicien)
[4] Si aucun dirigeable français n’a été attaqué par un avion ennemi, en revanche tous ont été atteints par des projectiles : le dirigeable nommé Alsace fut descendu dans les lignes allemandes, le Coutelle, l’Adjudant-Vincenot et le Champagne dans les lignes amies ; mais, à part deux morts, l’un à bord du Dupuy-de-Lôme, l’autre à bord de l’Alsace, il n’y eut aucune victime jusqu’à la perte du Pilâtre de Rozier, abattu en flammes avec tout son équipage, au dessus du territoire alsacien, le 23 février 1917.
[5] Le commandement de chaque section ou poste est confié à un officier où à un sous-officier supérieur.
[6] Pendant sa participation courageuse aux combats au sein du 10° Régiment d’artillerie de campagne dont il commande une batterie pendant l’hiver 1914-1915 (il est blessé à trois reprises), le capitaine Pagezy a rédigé un mémoire sur les principes du tir antiaérien dont le grand intérêt est manifeste. On lui doit notamment la formule : « On ne règle pas un tir (AA), on le prépare ».
[7] Yves Paul Gaston Le Prieur (1885-1963). Il est l’inventeur en 1915 d’un correcteur de tir qui permet au tireur d’un avion biplace d’ajuster un adversaire évoluant en trajectoire transversale et de l’atteindre jusqu’à une distance de 300 mètres.
[8] Document « Silhouettes d’avions classées par analogie ». Edition du 1/1/1916.
[9] Il s’agit de la 1ère section (à 2 pièces) de la 3ème batterie du 25ème RAC, positionnée ce jour-là aux lisières du bois de la Rappe, à proximité de Mouilly. Sur place, les quatre pièces de cette batterie ont été "affectées au tir de DCA" un mois auparavant, tout en devant rester en mesure d’effectuer des tirs de barrage.
[10] Formellement, la DCA de l’intérieur est née fin 1914, avec pour finalités de s’opposer aux attaques de Zeppelin visant des sites particulièrement importants en deçà d’une ligne passant par Saint-Malo, Rennes, Poitiers, Clermont-Ferrand, Montélimar et Barcelonnette.
[11] Il est fort intéressant de consulter le Journal des marches zet opérations de la 5ème section d’autocanons, qui retrace sa constitution et ses débuts opérationnels (période de février à décembre 1915)
[12] Ces commandements de DCA d’Armée viennent constituer un échelon hiérarchique essentiel mais ils sont assurés par des chefs d’escadron ou des capitaines qui sont laissés sans moyens et dont la tâche est démesurée.
[13] Le chef d’escadron Dupont élabora même un projet d’unités autonomes accompagnant la progression des troupes qui ne reçut qu’une application limitée, en février 1918, et ce au seul sein du Corps expéditionnaire américain.
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