Charles Monnet est fasciné par l’inventivité humaine et les progrès technologiques et plus particulièrement ceux observés dans l’histoire de l’artillerie française.
Arme savante par excellence, l’Artillerie a su innover et évoluer au cours des siècles, en se heurtant parfois à des réticences (internes à l’arme [1], comme externes [2] alors qu’il s’agissait toujours d’assurer "le succès des armes de la France" [3].
L’artilleur a été chimiste, fondeur, méchanicien, balisticien, tacticien et guerrier. L’Artillerie française et les artilleurs français ont été longtemps l’exemple de l’excellence pour d’autres nations qui s’en sont ensuite largement inspirés.
Charles Monnet a été un artilleur sol-air « missile », aux qualités techniques certaines et humaines vérifiées ; mais il s’est aussi intéressé à l’histoire des innovations dans toute l’Artillerie tant dans le domaine technique, que dans celui de la mise en œuvre, des matériels ou des munitions. Nous vous proposons ses études et mémoires sur des sujets très divers, allant bien au-delà du clivage des différentes spécialités de l’artillerie...
L’auteur nous amène progressivement sur des modes de tir qui vont "inspirer" l’imagination des artilleurs pour les amener progressivement à la diversification des procédés et des munitions allant du boulet au missile...
Les canons sont rayés, la trajectoire du nouveau projectile -l’obus - est mieux maîtrisée, la mise au point de fusées autorise un éclatement en tout point de la trajectoire. La porte est ouverte à des nouveaux effets.
Les munitions du système La Hitte.
Rapidement au début de la 1ère guerre mondiale, les positions des armées se figent. Les troupes « s’enterrent ». Les dispositifs se durcissent (réseaux de barbelés) et c’est au Génie de les détruire. Comme il trop dangereux pour les sapeurs de déposer eux-mêmes de lourdes charges d’explosif, celles-ci sont propulsées : ce sont les crapouillots. L’artillerie de tranchée est née, mais aussi l’ère de projectiles propulsés, laquelle annonce d’autres moyens d’intervention (roquettes, missiles...).
Cette subdivision de l’Arme ne survivra pas à la fin de la guerre, en dépit de faits d’armes [4] parmi les plus glorieux.
Un engin est tiré en altitude par un canon ; un parachute est éjecté, sous lequel se déroule un fil d’acier de 500m de long, avec un harpon à l’extrémité. En tirant plusieurs engins on créé un rideau, ou maillage qui fait obstacles aux avions. Ce concept est vite abandonné mais pourrait peu-être ressurgir ? (lutte contre objets volants : drones ou autres...).
Le colonel Pagésy père de l’artillerie antiaérienne disait qu’ « On ne règle pas un tir, on le prépare ». En effet l’objectif étant en constant déplacement, il faut extrapoler le point dans l’espace où l’obus le rencontrera.
Des appareils particuliers sont nécessaires pour effectuer ces calculs ; cliquer ici.
De tout temps l’écoute des bruits dans une zone de combats permet d’appréhender les mouvements ennemis. Les sens humains se révélant insuffisants, il a fallu trouver des moyens mécaniques pour les améliorer.
La détection au son est utile lorsque l’œil n’y suffit pas. En fait le réflexe est de tourner la tête en direction d’un bruit avant d’identifier à l’œil l’intrus.
La conclusion de la conclusion est que ces nouvelles découvertes ont profité et vont profiter à une autre composante de l’artillerie qui va se développer à la même époque, celle de l’artillerie de repérage, qui va s’attaquer aux objectifs défilés à la vue directe [5] pour leur prise à partie par l’artillerie lourde et l’aviation. Combinée avec la Géographie et l’observation aérienne, le Repérage va révéler le Renseignement d’artillerie.
C’est pendant la première guerre mondiale que sont imaginés, par les français, les premiers dispositifs d’écoute.
Les matériels d’écoute de 14-18 ne permettent plus de détecter correctement la menace aérienne qui a évoluée (vitesses, altitude de vol). Les capacités d’écoute de ces appareils mais aussi leur mobilité sont améliorées.
L’artillerie a souffert depuis le début de son manque de mobilité. C’est du moins le cas avéré pour l’artillerie de campagne qui accompagne les unités appuyées.Son charroi nécessitait de très nombreux animaux de trait (boeufs et chevaux). Jusqu’à ce que la technologie apporte de nouvelles réponses à ce dilemme.
Cugnot, artilleur, a été un précurseur avec son fardier d’artillerie à vapeur. Il faut attendre le début du 19e siècle pour que les armées (dont l’armée française) pensent à utiliser des tracteurs à vapeur.
Cette traction à vapeur aura d’autres incidences pour l’artillerie française avec l’usage de voies ferrées pour l’artillerie de fortification, puis l’artillerie lourde à grande puissance... Avec l’arrivée des moteurs à explosion on fera l’artillerie d’assaut (futurs blindés), on aura aussi des automoteurs (même à moteur électrique dès la 1ère GM), puis des autocanons pour la DCA... Le cheval sera définitivement abandonné lors de la constitution de l’artillerie de la reconquête en 1943.
[1] Historiquement on a eu beau jeu de comparer les artilleurs selon le matériel qu’ils servaient : artillerie de campagne, artillerie de siège, artillerie de fortification, artillerie côtière : on a connu aussi des divergences de point de vue entre les rouges et les bleus ( les adeptes du système de Vallière et du système de Gribeauval) ; au sein de l’artillerie de campagne on fait la différence entre l’artillerie légère et l’artillerie lourde, l’artillerie à pied, l’artillerie montée et l’artillerie à cheval, l’artillerie sur voie-ferrée ; on différencie l’artillerie de la Marine de l’artillerie de Guerre ; l’artillerie de campagne à l’artillerie de D.C.A. et plus tard l’artillerie sol-sol (classique et nucléaire) de l’artillerie sol-air (légère avec les canons, puis lourde avec les missiles). On atteint le sommum quand on y greffe un champ privilégié d’action (Artillerie coloniale, de Montagne, Parachutiste, Afrique, Extrême-Orient) etc...
[2] Dès le XVIIè siècle, quand on a construit des canons légers, l’infanterie et la cavalerie ont voulu s’en doter ; l’Artillerie et le Génie se sont partagées la paternité des ballons d’observation puis de l’aviation, de l’artillerie de tranchée (convoitée aussi par l’infanterie) ; la DCA va passer de l’armée de terre, à l’armée de l’Air, revenir à l’armée de terre et partiellement à l’armée de l’air (Artillerie sol-air moyenne portée) ; la composante nucléaire stratégique balistique terrestre sera confiée à l’armée de l’air.
[3] Encore récemment pendant la Guerre en Afghanistan, le manque d’appuis au début des opérations a eu des conséquences désastreuses. Sont apparues alors les expressions "Pas un pas sans appui !" ou bien les appuis sont "les assurances-vie" des armes de mêlée.
[4] Les artilleurs de tranchée partageaient les conditions de vie et de combat de l’infanterie de ligne.
[5] Rôle des sections de repérage par le son - SRS - et sections de repérage par observation terrestre - SROT .