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Sources : Archives du Sénat - Commission de l’armée
Suite au rapport à la Commission de l’Armée sur le matériel d’artillerie lourde, par M. Charles HUMBERT (adopté le 31 mai 1915), le programme suivant a été adopté le 8 juin 1915.
Un renforcement considérable de notre artillerie lourde et dont les effets se feraient sentir immédiatement, peut être obtenu :
en adaptant divers types de canons de marine et de côte aux conditions de la guerre terrestre ;
en reprenant ou en activant la fabrication de types modernes fournis par l’industrie.
.
Les adaptations peuvent porter sur les types suivants :
340 - 320 - 305 - 274 - 240 T.R. - 194.
340. Les cuirassés "Languedoc", "Normandie" "Flandre" et "Gascogne", dont l’achèvement, fixé tout d’abord au printemps de 1916, ne pourra être obtenu au plus tôt qu’au printemps de 1917, doivent être armés de 48 canons de 340 ; 8 canons de rechange sont également prévus. Ces canons, étant donnée la date tardive d’achèvement des navires, peuvent être employés à terre dès leur livraison. Sur ces 56 pièces toutes modernes, la moitié environ sont terminées ou sur le point de l’être. Les autres doivent être livrées la d’ici la fin de l’année. Le canon de 340 lance à une distance pouvant atteindre 30 kilomètres un projectile d’un poids d’environ 500 kilos.
Il convient d’activer la fabrication et de faire construire les affûts et plate-formes nécessaires à l’usage de ces pièces à terre. Les livraisons pourraient commencer dans un délai de deux ou trois mois.
Il est nécessaire d’étudier et de commander des obus d’un type nouveau, le projectile actuellement adopté étant destiné à la rupture des cuirassements et portant, comme tel, un trop faible poids d’explosif dans une épaisse carapace d’acier. Un délai de deux ou trois mois suffira pour commencer les livraisons de ces nouveaux obus.
320• II existe une centaine de canons de ce modèle. On peut ainsi constituer une artillerie homogène assez nombreuse. Le 320, qui remonte à 30 ou 35 ans, lance un obus de 480 kilos à 18 kilomètres. Une simple modification des affûts, qui existent, permettrait l’emploi de la pièce à terre. Dans un délai de deux ou trois mois peuvent commencer les livraisons. Un obus pour ce canon, adapté aux nécessités de la guerre terrestre a été étudié et peut être mis immédiatement à exécution.
305. Un canon de ce type - qui peut lancer à 25 kilomètres un projectile de 340 kilos - a été monté sur truck avec plateforme. Il est prêt servir. Un deuxième est en voie d’aménagement.
15 autres pièces du même type peuvent être également utilisées. Il y a lieu de prescrire immédiatement les travaux nécessaires.
De nouveaux obus devront être établis, comme pour le 340, et, de même que pour ce modèle, pourront être livrés d’ici deux ou trois mois.
274. Cette pièce lance un obus d’environ 250 kilos à 22 kilomètres. Elle présente l’avantage d’un matériel puissant, pouvant tirer sur rails, et par conséquent aisément déplaçable.
Une installation sur truck de cette bouche à feu est achevée. II y a lieu d’utiliser, de suite, dans les mêmes conditions une douzaine de matériels semblables, les seuls qui existent.
240 T.R. La portée de cette pièce est de 15 kilomètres et l’obus pèse 163 kilos. 12 matérie1s montés sur affût spécial sont en commande et les premières livraisons auront lieu en Juillet-Août. Activer cette fabrication. Il y a lieu de commander sur le champ 24 autres matériels. Nous possédons au total une centaine d’exemplaires, ce qui permettrait d’augmenter encore ultérieurement le nombre des batteries à constituer. Ces canons ont sur les autres 1’avantage fort appréciable d’avoir leur obus (obus P) et d’être approvisionnés dès à présent à 5 ou 600 coups par pièce.
194. Ces canons, modèle 70-87, ont une portée d’environ 16 kilomètres. 24 installations sur truck ont été commandées. 6 sont en service, 6 sont reçues, les 12 autres seront prochainement livrées. Il existe encore une vingtaine de canons, à utiliser comme tube de rechange. Ces pièces tirent des obus en fonte. Des obus type D en acier sont à l’étude. Il faut aboutir de suite.
Les travaux nécessaires pour la mise en service à terre de tous ces canons peuvent être exécutés pour la plus grande partie par les soins du Ministère de la Marine, en utilisant aussi bien dans les arsenaux de l’Etat que dans les chantiers de construction toute la main d’œuvre qui peut être rendue disponible en suspendant la construction de 4 cuirassée cités plus haut, qui ne pourront certainement jouer aucun rôle dans la guerre actuelle. On obtiendrait ainsi de 4 à 5000 ouvriers métallurgistes, chaudronniers, riveurs, ajusteurs, etc. main-d’œuvre précieuse, dont on ne s’explique pas qu’elle n’ait pas encore été concentrée sur les travaux urgents de la guerre.
Remarquons en passant que les fabrications qui vont lui être demandées sont, entièrement analogues à celles dont elle restait inutilement chargée.
Votre rapporteur constate avec plaisir qu’il lui a suffi de signaler au Ministre de la Marine le grand service qu’il pouvait rendre à nos armées pour obtenir aussitôt son concours le plus empressé.
Il sera utile de faire appel, sans plus tarder, au concours de l’industrie étrangère pour hâter la fourniture des obus de divers types, sous la condition bien entendu, d’instituer un contrôle sérieux et de survei11er la fabrication du métal comme on le fait en France.
Le délai nécessaire à la mise au point du puissant matériel de 381, construit par le Creusot pour le Gouvernement italien ne permet pas d’en envisager une fabrication nouvelle.
Quant à l’exemplaire existant au Havre, il parait maintenant trop tard d’après les déclarations du Gouvernement pour le réquisitionner. C’est grand dommage que l’administration de la Guerre ait négligé de le faire quand l’occasion s’offrait.
Il faut donc se borner à presser la mise au point des matériels qui peuvent être réquisitionnés dans les établissements de l’industrie et à activer la production des pièces en cours de fabrication.
293. Ces six puissants obusiers modernes pourront être livrés à partir d’août sur des installations analogues à celles du 240 T.R,
Mais, dès à présent, 4 pourraient être mis en service sur trucks à voie normale.
3.000 obus à amorçage de culot du modèle arrêté en premier lieu sont prêts pour le chargement en explosif.
Nous répétons qu’il y a lieu d’employer sans délai ces pièces remarquables qui pourraient répondre efficacement aux mortiers autrichiens de 305, dont les Allemands commencent à se servir pour tirer sur nos tranchées.
240. Deux matériels de 240 entièrement modernes, avec obus, commandés par le Mexique, existent à Saint-Chamond. II faut les réquisitionner de suite et les mettre en service.
120. Sur 14 batteries d’obusiers de ce calibre en fabrication aux ateliers Schneider, sur commande de la Grèce, 3 ont été livrées à la Belgique. Pour les 11 autres le travail a été suspendu. II faut la reprendre immédiatement et commander de suite une 12e batterie pour former 3 groupes complets. La 1ère batterie serait livrée un mois après l’ordre de remise en train. Les fournitures se suivraient ensuite à raison d’une, puis de deux batteries par mois. Les obus du canon de 120 serviraient pour cette pièce. L’utilité des obusiers modernes n’a d’ailleurs plus besoin d’être démontrée. Tous les jours nous en avons de nouvelles preuves sanglantes.
A titre d’exemple, nous citerons le fait suivant. Dans la dernière attaque de Carency, un obusier allemand de 105, d’une distance de 1000 m, tirait sur une fraction de nos troupes, mettant hors de combat 4 ou 5 de nos hommes à chaque coup ; notre artillerie ripostait bien, mais sans efficacité ; la pièce ennemie se trouvait dans une légère dépression de terrain, et la trajectoire tendue de nos canons ne parvenait pas à l’atteindre, tandis qu’elle-même, grâce à son tir courbe, nous frappait à coup sûr.
105. Le Creusot est actuellement chargé de l’exécution de deux séries de 110 pièces de 105 - dont l’une est la reprise d’une commande antérieurement faite à Bourges. Comme nous 1’avons dit déjà, une troisième série de 110 pièces doit être immédiatement commandée, pour que la fabrication ne subisse plus d’arrêt.
Nous insistons à nouveau sur la nécessité d’essayer au plus tôt, aux charges de combat, les obus du nouveau tracé commandés pour les mortiers de 370, de 293 et de 280. On ne s’explique pas que cette expérience capitale n’ait pas encore été faite.
Enfin nous signalons l’urgence d’activer l’acquisition ou la fabrication de téléphones, de télémètres, d’appareils de visée, etc, susceptibles d’augmenter de beaucoup les facilités d’emploi de l’artillerie.
L’adaptation de tracteurs aux canons lourds doit être également poursuivie avec beaucoup plug de célérité, d’autant plus que l’Amérique a fourni des appareils de cette nature remarquablement maniables et puissants.
Enfin nous revenons, de la manière la plus instante sur la question des munitions d’artillerie lourde destinées à nos vieilles pièces. Il faut, en particulier, de toute urgence, parer aux besoins de la consommation des 120 et 155.
Puisque nous n’avons pas encore d’artillerie lourde moderne, donnons au moins à nos vieilles pièces le moyen de produire leur maximum d’effet.
En terminant, il ne semble pas inutile de signaler au Gouvernement la nécessité de former dès à présent, le personnel qui sera chargé d’employer, au front, le puissant matériel dont l’application de ce programme permet de doter à très, bref délai les armées.
Ce personnel pourra être fourni soit par la guerre, soit par la Marine.
II est indispensable que lorsque nous aurons les canons et les obus, nous ayons aussi les artilleurs capables de les employer.
A ce propos, la Commission rappelle à M. le Président du Conseil que de sérieux moyens de combat demeurent inutilisés, sans qu’on en puisse apercevoir la raison : elle cite, entre autres, en dehors des obusiers de 293 indiqués plus haut le mortier de 280 qui tire au Polygone du Hoc, le canon de 305 actuellement existant à Versailles, et les batteries de mortiers de 270 constituées en Bretagne depuis plus de 6 mois.
La Commission, en communiquant le présent programme au Gouvernement, le prie de lui faire connaître, dans un délai aussi rapproché que possible, les décisions qu’il prendra en conséquence.
Elle charge sa sous-commission de l’armement de contrôler l’exécution de ces mesures, en se rendant à cet effet dans les ports de guerre, les arsenaux, les chantiers et autres établissements de la marine, et, d’une manière générale, partout où elle croira devoir porter ses investigations dans l’intérêt du salut public.