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1916 : Verdun
 

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Extraits du livre "Histoire de l’Artillerie Française", réalisé sous la direction de Michel Lombarès, et les généraux P.Renauld et Cazelles, Boussarie et Coulloumme-Labarthe, Editions Lavauzelle, avec quelques ajouts et commentaires du général Bariller, administrateur de ce site.

En l’année du centenaire de la bataille de Verdun, il est important de rappeler l’apport de l’artillerie dans cette bataille, la plus célèbre et des plus meurtrières de la 1ère Guerre Mondiale.

Les combats de Verdun

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Les allemands profitant des bois, du temps couvert et des nuits longues, ont pu concentrer en secret devant Verdun une masse de plus de 1 000 pièces lourdes pour appuyer une attaque de 4 corps d’armée de choc aux ordres du Kronprinz de Prusse.

La préparation commence le 21 février à 7 heures, nivelant tranchées et boyaux de la première ligne de la rive droite de la Meuse. L’infanterie allemande débouche à 16 heures et occupe cette première ligne ; mais l’artillerie française, relativement peu touchée par la préparation, lui fait subir de grosses pertes. Les attaques continuent, les jours suivants avec la même tactique, la même progression, les mêmes pertes. Le 25 février, le fort de Douaumont, non défendu faute de moyens, est occupé par les Allemands.

L’attaque reprend aux ailes : à l’est sur le fort de Vaux, à l’ouest sur la rive gauche, d’où les batteries de la défense, prenant d’enfilade les assaillants de la rive droite, les avaient sérieusement fait souffrir les jours précédents. Cette fois la préparation allemande, instruite par l’expérience, comporte des tirs massifs de contre-batterie à obus toxiques. Elle veut neutraliser cette artillerie française qui, du 21 février au 10 mars, a tiré 185 000 obus de 75mm, sans lesquels l’infanterie n’aurait pu fournir sa magnifique résistance. L’artillerie lourde française cherche à riposter ; malheureusement, malgré des progrès non négligeables, sa portée reste inférieure à celle des canons allemands.

Cette artillerie, comme l’infanterie, s’use rapidement, et d’autant plus que les divisions allant au repos doivent, le plus souvent, laisser leur artillerie à la disposition de l’unité relevante, elle-même renforcée de groupes en provenance du corps d’armée et de la réserve générale d’armée ; ce qui exige d’ailleurs, de créer un commandement de l’artillerie divisionnaire [1].

Une dernière attaque allemande est bloquée, le 23 juin, devant le fort de Souville par les tirs d’artillerie. C’est la fin, car le lendemain démarre l’offensive sur la Somme, qui a continué de se préparer pendant les combats de Verdun, et qui du coup oblige les Allemands à y prélever des troupes.

Le 24 octobre, après un bombardement auquel participe un obusier de 400mm Saint-Chamond, le fort de Douaumont est repris ; le 2 novembre, c’est celui de Vaux.

Les attaques de décembre, bien appuyées par l’artillerie [2], reprennent la plus grande partie du terrain perdu depuis début février. Ces succès mettent en vedette le général Nivelle, commandant la 2ème armée, déjà connu comme artilleur, qui remplacera le général Joffre, au commandement en chef.

L’apport de l’artillerie dans cette bataille, et les nouveautés

Comme depuis le début de la guerre en 1914, l’artillerie française souffre d’un déficit grave en artillerie lourde par rapport à l’artillerie allemande. Fort heureusement le canon de 75mm fait encore la démonstration de ses qualités, ce qui permet localement de prendre l’ascendant. Mais dès le début de 1916, les choses commencent à changer avec notamment la création d’une Artillerie lourde à grande puissance [3], utilisée efficacement avec la contribution des Sections d’artillerie lourde, appellation donnée à une escadrille d’avions par corps d’armée, spécialisée dans les missions d’observation et de réglage au profit de l’artillerie.

L’artillerie de tranchée voit ses matériels passer de 1100 en octobre 1915, à 2500 en février 1916, puis à 3000 à la fin de 1916. Le personnel, extrait de l’artillerie divisionnaire est organisé progressivement en batteries, groupes, groupements. [4].

L’artillerie met également son Service automobiles aux armées [5] à disposition, pour apporter à Verdun, par la route construite pour l’occasion [6], la Voie sacrée, les relèves [7] qui se succèdent sans fin, les vivres et munitions qu’il faut en grande quantité.

Puis, comme cela a été évoqué, l’artillerie est amenée a réorganiser son commandement pour conduire une manœuvre tactique de l’artillerie, adaptée aux exigences stratégiques du combat.

Par ailleurs, en 1916 (février), il n’est pas inutile d’évoquer qu’en raison des évolutions des techniques du tir et de l’arrivée de nouveaux matériels, des centres d’instruction des tirs sont mis en place [8] , pour parfaire les connaissances des personnels de l’artillerie.

Enfin, en 1916 est créé un 163e régiment d’artillerie, qui n’est qu’une structure administrative, composé de « sections de repérage » (SRS) et de « sections de renseignement par observations terrestres » (SROT). mises chacune à la disposition d’un régiment d’artillerie de campagne, pour acquérir le Renseignement d’artillerie.

L’année 1916 prend date dans la modernisation de l’artillerie française, en dépit de tous les sacrifices consentis.

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Liste des régiments d’artillerie qui ont l’inscription VERDUN sur leurs emblèmes : 1, 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 31, 32, 33, 34, 36, 38, 39, 40, 43, 44, 46, 48, 50, 52, 53, 54, 55, 56, 58, 59, 60, 61, 62, 65, 66, 67, 82, 90, 94, 101, 102, 104, 106, 107, 108, 109, 110, 111, 112, 113, 114, 115, 116, 117, 118, 120, 121, 129, 130, 133, 151, 154, 155, 157, 158, 163, 165, 181, 182, 184, 196, 188, 190, 192, 194, 196, 216, 217, 218, 235, 239, 262, 265, 273, 281, 301, 302, 303, 305, 308, 309, 311, 312, 313, 353, 363, 365, 371, 372 et 22 Colonial.

Les autres régiments étaient à l’œuvre sur d’autres fronts. [9]

[1] On met en place des commandants d’Artillerie divisionnaire (A.D) disposant d’un état-major, afin de de manœuvrer au mieux les nombreux groupes donnés en renforcement.Chaque commandant de régiment d’artillerie de division reçoit un état-major pour constituer à son niveau un groupement d’artillerie. De la même façon, le commandant de l’artillerie lourde de corps d’armée, qui ne dispose que d’un adjoint, aura lui aussi, un état-major.

[2] L’artillerie de l’armée, aux ordres du général Franiatte, va tirer 430 000 obus.

[3] Mais toujours inférieure à l’artillerie allemande en portée...Il faudra encore attendre 1917 avec la création de la Réserve générale d’artillerie lourdepar le général Nivelle, commandée par le général Bua, pour voir une sensible amélioration dans son emploi.

[4] Il faudra attendre 1918 pour voir apparaître des régiments d’artillerie de tranchée : 5 du 175è au 179è RAT, regroupant 50 000 canonniers. Ce qui explique l’absence d’inscription de VERDUN sur leurs étendards.

[5] Dirigé par les lieutenants-colonels d’artillerie Girard puis Doumenc.

[6] Les voies ferrées étant bloquées à Saint-Mihiel.

[7] L’Armée française fait passer à Verdun, par rotation, 70% de ses Poilus, ce qui contribua à l’importance symbolique de cette bataille.

[8] Sous les ordres du général Herr, président du Centre d’études de l’artillerie aux armées.

[9] Par exemple, pour n’en citer que quelques uns, ceux qui sont encore à l’ordre de bataille en 2016, année du centenaire :

  • Le 35e RAP (dans la somme en 1916),
  • Le 93e RAM (en Orient en 1916),
  • les 3e et 11e RAMa (dans la Somme en 1916).

Le 17e GA a l’inscription MORT-HOMME obtenue en 1917.


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