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Le repérage de 1965 à nos jours
 

Allocution du général Jaumotte

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Pour compléter ce que vient de vous relater Pierre Recher, je vais vous expliquer maintenant l’évolution du repérage de 1965 à nos jours.

Cette évolution est marquée par un changement complet d’organisation et de capacités. En effet, dès la reconstruction de l’armée française de l’après-guerre, la technique du radar étant apparue, le repérage s’en est emparé pour développer des moyens d’acquisition d’objectifs plus performants, en termes de temps de réponse et de précision. Ainsi sont nés les radars de contre batterie (radars Q4 et Q10 américains) qui permettaient le repérage des batteries en train de tirer, puis les SDS [1] (radar de surveillance du sol) qui permettaient la localisation et le suivi des objectifs mobiles.

Ainsi le 6°RA, qui était en garnison à Hettange-Grande, et que j’ai connu quand je commandais ma batterie au 25°RA de Thionville, connaissait et servait l’ensemble des systèmes de repérage que je viens de citer. Parallèlement, les drones ont fait leur apparition dès 1964. C’est en effet cette année-là que le R20 fut déclaré opérationnel au 7°RA qui tenait alors garnison à Epernay.

Le 6°RA et le 7°RA constituaient d’ailleurs à l’époque les deux seuls régiments de repérage de l’armée française, les batteries de repérage d’antan n’existant plus qu’en cas de mobilisation.

Au fil des évolutions des matériels et des besoins opérationnels, ces régiments se sont transformés pour devenir (dès 1983) des Régiments de Surveillance et d’Acquisition (RSA), l’un armant deux batteries de radar sol-sol RASIT, et l’autre deux unités de drones rapides CL 89. Les deux RSA étaient alors complémentaires ; pour emploi, ils s’échangeaient une batterie pour former deux régiments identiques en opération, de façon à rejoindre chacun un corps d’armée, le 1°CA pour le 7°RA et le 2°CA pour le 6°RA.

A noter que des radars de contre batterie existants (Q4 et Q10) dotaient alors les régiments d’artillerie lourde divisionnaire et que la priorité pour le 6°RA restait la surveillance radar du sol.

Parallèlement, la STAT (Section Technique de l’Armée de Terre) expérimentait le MART (Mini Avion de Reconnaissance Télécommandé), qui fut affecté au 8°RA, en prévision de la mutation du régiment en troisième RSA pour en doter le 3°CA (Force d’Action Rapide). C’est ainsi que le 8°RA a été engagé avec le MART dans la 1° guerre du Golfe, mais qu’il n’est jamais devenu 3°RSA en raison des réorganisations suivantes des armées.

Parallèlement encore le 6°RA qui a récupéré le MART, participe aux expérimentations du radar sol-sol HORIZON (Hélicoptère d’Observation et Radar d’Investigation de ZONe) qui succède au programme ORCHIDEE. Ce système monté sur hélicoptère, d’une portée de 100 kilomètres, sera finalement mis en place au 1°RHC qui intégrera des opérateurs radars du 6°RA.

Dans le même temps, suite à une réorganisation liée à une nouvelle réduction du format des armées, les deux régiments passent sous le commandement de la 1° Armée. Le 6°RA expérimente le système CRECERELLE, un drone lent plus performant que le MART, tandis que le 7°RA abandonne le CL89 et passe sur le CL 289, qui a une allonge trois fois plus importante (400 kms) que son prédécesseur et des capteurs plus performants qui permettent l’exploitation d’images de jour comme de nuit ainsi qu’en temps réel (système PIVER).

Malheureusement, suite à des nouvelles mesures de réorganisation des armées, le 6°RA est dissous en 1993 à Phalsbourg. Sa 2° batterie radars rejoint le 1°RA ou elle devient la 6° batterie dotée de radars de contre-batterie COBRA. Le reste du régiment, dont la 1° batterie équipée de CRECERELLE, devient le 6°Groupe du 7°RA et reste à Phalsbourg jusqu’en 1998 où il rejoint Chaumont.

Parallèlement, le 7°RA qui compte désormais trois groupes, deux groupes de drones rapides CL289 et un groupe ALT (Avion Léger Télé-piloté) CRECERELLE, est désormais le seul régiment de renseignement d’origine imagerie (ROIM) de l’armée de terre. Avec des effectifs plus que doublés, il passe sous la coupe de la brigade de renseignement et de guerre électronique (BRGE). En 1999, victime d’une énième restructuration des armées, le 7°RA est restructuré et déplacé de Nevers à Chaumont où il prend l’appellation de 61°RA en conservant les moyens et les missions du 7°.

A partir de 2004, le 61°RA expérimente le SDTI pour remplacer le CRECERELLE ; le SDTI est mis en service opérationnel en 2006.

Parallèlement, à partir de 2008, le régiment, comme toutes les batteries de renseignement de brigade (BRB) des régiments d’artillerie, est doté de drones de reconnaissance au contact (DRAC) ; un mini-drone capable de collecter des informations en temps réel sur une profondeur de 10 kilomètres. Enfin le 61°RA continue de mettre en œuvre le CL289.

Engagé dès 1996 en Bosnie puis au Kosovo et au Tchad, le CL289 fait une dernière campagne de vols au camp du Larzac en mai 2010 et est retiré d’emploi au mois de décembre suivant après près de vingt ans de bons et loyaux services où il a démontré son efficacité.

Aujourd’hui, la distinction entre les systèmes de repérage qui sont, par définition, dédiés à l’artillerie et qui existent toujours, et les systèmes de renseignement qui travaillent au niveau des forces, ne se fait plus guère.

En effet, les moyens actuels de traitement des données rassemblent l’ensemble des informations des tous les systèmes (de surveillance de l’ennemi, de repérage, d’étude du terrain, du spectre électromagnétique, de la géographie ou de la météo, quels qu’ils soient) et en font ressortir aussi bien les renseignements nécessaires à la manœuvre que ceux concernant les objectifs à traiter par les moyens de feu, que ce soit l’artillerie, l’aviation ou tout autres.

Ainsi, pour le repérage dans la profondeur, le 61°RA, héritier du 7°RA, reste le régiment spécialisé dans le domaine des drones tactiques et du ROIM. Le successeur du SDTI devrait être connu en 2016. Les batteries COBRA du 1°RA, qui mettent en œuvre des radars de contre-batterie et des moyens de détection acoustique (SL2A) sont les héritières des unités radars du 6°RA. Engagées pour la première fois en 2006 au Liban, elles sont en auto-relève depuis dix ans sur ce théâtre.

Pour le repérage au contact, les batteries d’acquisition et de surveillance (BAS) qui sont en cours de remplacements des BRB sont les héritières des batteries de repérage des deux guerres car elles mettent en œuvre des radars de surveillance du sol, des drones de contact et des systèmes de repérage des tirs au profit de l’artillerie.

Au niveau associatif, pour tenir compte de toutes ces évolutions successives, notre fédération s’est adaptée et comprend maintenant, comme vous avez pu le constater dans son sigle, aussi bien les amicales des unités de repérage traditionnelles que celles de toutes les unités d’artillerie chargées du renseignement.

Depuis 2010, la salle Guyon-Gellin, salle d’honneur et de traditions du repérage a été confiée à la garde de la 6° batterie radars (COBRA) du 1°RA. Elle a officiellement été inaugurée le 22 mai 2011 en présence de membres de la famille de celui qui est encore aujourd’hui la figure emblématique du repérage ; le lieutenant Guyon Gellin.

[1] Voir les notices relatives au DRMT 1A et DRMT 1B


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