Chers amis,
Comme tous les ans, nous sommes réunis pour fêter Sainte Barbe. Mais cette année nous célébrerons aussi ensemble - et entre nous - le centième anniversaire du Repérage, apparu en 1915. Son histoire comporte essentiellement deux périodes :
La première période commence en 1914. Au début, ce fut une guerre de mouvement, jusqu’à l’arrêt de la progression allemande sur les bords de la Marne. A partir de 1915, les deux armées s’immobilisent et s’enterrent. C’est une guerre de position qui va s’éterniser : c’est la tristement célèbre « guerre des tranchées ». L’infanterie étant immobilisée dans les trous, l’artillerie joue un rôle de plus en plus important. Il devint vite évident à nos artilleurs qu’ils devaient absolument détruire les batteries ennemies qui massacraient nos fantassins. Il fallait donc trouver le moyen de les repérer, de les localiser pour pouvoir ensuite les neutraliser.
Les artilleurs expérimentèrent et perfectionnèrent tout d’abord l’observation terrestre, en créant des postes d’observation sur des points hauts, puis en utilisant différents moyens plus ou moins ingénieux : ballons captifs, cerf-volants... pour avoir une vue étendue sur le champ de bataille. Ces postes d’observation étaient reliés par des liaisons téléphoniques à un central qui recoupait leurs observations et coordonnait leurs actions : c’est l’origine du "ALLO LES POSTES" qui fait toujours la UNE de notre journal des Sioux.
En même temps, nos anciens développaient l’observation par le son :
Cependant, le repérage par le son présentait de nombreux avantages : il n’exposait pas les observateurs à la vue de l’ennemi, et n’était pas gêné par les conditions atmosphériques.
Le repérage est en place. Les batteries de repérage sont créées.
Chaque batterie de repérage comprend :
Le REPÉRAGE est né.
Il a un emblème : le Sioux qui regarde et le Sioux qui écoute.
Ses résultats sont bientôt connus et reconnus de tous. Quelques chiffres nous montrent comment le Repérage s’est formé et s’est développé parallèlement à l’importance croissante de l’artillerie au cours de la Grande guerre.
450 000 artilleurs | 1 300 000 artilleurs |
Soit 20 % des mobilisés | Soit 40 % des mobilisés |
4 300 bouches à feu | 15 000 canons |
4 canons pour 1 000 fantassins | 15 canons pour 1 000 fantassins |
0 batterie de repérage | 200 batteries de repérage |
Après l’Armistice et la victoire, à la fin de la guerre en 1918, on démobilise et les repéreurs sont rendus à la vie civile. Ils deviennent réservistes.
Le repérage rentre alors en sommeil jusqu’au jour il prend logis à Saint Cloud. Il devient le 6ème GAA (Groupement Autonome d’Artillerie).
Le quartier Sully présente de nombreux avantages.Etant aux portes de Paris, il attire les conscrits et de nombreux anciens « Artilleurs-Repéreurs » qui y viennent facilement. Ces réservistes de la grande guerre créent des cours de Repérage et surtout des cours de perfectionnement pour les sous-officiers du repérage. En effet il n’existait pas de manuel du Repérage. Les nouveaux prennent peu à peu la relève, comme par exemple, le lieutenant Guyon Gellin très présent et très efficace. Le repérage se modernise notamment en se motorisant, mais les techniques sont toujours celles de la Grande Guerre.
Au moment de la déclaration de guerre en 1939, le repérage met sur pied 24 batteries lors de la mobilisation qui sont déployées de la mer du Nord jusqu’à la Méditerranée. C’est « la drôle de guerre : il ne se passe rien. Les repéreurs n’ont pas l’occasion de montrer leur savoir faire. Et c’est dans cette atmosphère irréaliste que le lieutenant Guyon Gellin, de la 7ème batterie trouve la mort le 13 mars 1940 en se portant à l’un de ses postes qui reçoit le baptême du feu. En mai 1940, c’est l’invasion allemande...
L’armée française est bousculée... Certaines batteries parviennent à s’échapper, beaucoup sont prisonnières et connaissent la captivité en Allemagne.
A la suite du débarquement allié en Afrique du Nord, les américains équipent et forment des repéreurs avec leurs nouveaux matériels. Ils constituent deux groupes le 101° et le 102° G.O.A. (Groupe d’Observation d’Artillerie). Ces groupes participent aux campagnes d’Italie et de France et repèrent au total plus de 800 batteries ennemies.
En 1945, c’est le même scénario qu’en 1918 !!! Les 5 000 repéreurs sont démobilisés ou rapatriés depuis les camps de prisonniers. Le repérage tombe dans l’oubli jusqu’au moment où il reparait en 1950 au 25° RA à Thionville sous les ordres du colonel Nicollet qui s’intéresse au Repérage et monte le III-25 RA (c’est là que « j’entre en Repérage », en sortant de l’école d’Artillerie à Idar où je n’avais jamais entendu parler de Repérage).
Le colonel Nicollet nous fait participer à toutes les manœuvres possibles en France et en Allemagne occupée. A Munsingen, nous voyons arriver des officiers de réserve pour des périodes, comme le colonel Thiberge ou le colonel Michon. Comment les caractériser ? Ils sont intimidants mais sympathiques, discrets mais très intéressés par le Repérage, d’une grande simplicité, peu regardant à l’âge ou au grade.
Ils nous font découvrir les Amicales du Repérage : l’Amicale des officiers et celle des sous-officiers, les Amicales de batterie, ainsi que leur regroupement au sein de la Fédération Nationale des Anciens du Repérage.
Ce sont ces amicales qui ont contribué à maintenir le lien profond qui a uni tous les repéreurs de la 2ème guerre mondiale en faisant naître et développer cet esprit du Repérage qui nous rassemble encore aujourd’hui.
Le repérage est peu ou pas mêlé aux guerres d’Indochine et d’Algérie !
En 1965, le Repérage fête son cinquantenaire en présence du ministre des armées, Pierre Messmer. Nous étions nombreux, un millier, autour de Lucien Thiberge, président de la Fédération.
Notre spécialité est née par nécessité, au combat, au sein d’une Arme traditionnelle, l’Artillerie. Elle ne s’est développée et maintenue que grâce aux efforts conjugués des artilleurs d’active et de réserve. Notre petit groupe a conservé son originalité, a cultivé son indépendance et a su garder une fidélité en amitié au sein de ses amicales. Le repérage a mûri lentement jusqu’à devenir un outil indispensable au sein de nos armées. Avec le développement des techniques modernes, il est promis à un bel avenir, ...