Extrait de l’"Historique de l’artillerie de la 2° Division d’Infanterie Marocaine - 1942-1945"
Le Rhin franchi, l’exploitation est confiée à des Groupements tactiques dont le nombre et la composition varient en fonction de la résistance rencontrée et de la mission à remplir. Initialement trois groupes, les I/63, III/63, IV/63 appuient le Groupement Chapuis (151ème R.I., un escadron du 3ème R.S.A.R.) trois autres, les II/63, II/62 et III/66, appuient le Groupement Schloesser (C.C. 4, 2ème Dragons, 4ème R.T.M.). Au cours de cette période, l’avance se poursuit en direction du Sud. Elle s’infléchira vers le Sud-Ouest après la prise de karlsruhe. Cette ville est brillamment enlevée le 4 avril par les chars du 3ème R.SM. et des éléments du Groupement Schloesser. Rüppurr est occupé le même jour, tandis que le Groupement Chapuis s’empare de Helmsheim, Koenigsbach et Diedelsheim sont pris le 5, Maulbronn et Otisheim le 6.
Le rôle des observateurs avancés est souvent décisif. Le Lieutenant Gien, du I/63, appuie quatre attaques dans la journée du 5 Avril. Le bataillon du 5ème R.T.M. auquel il a été détaché, se trouve arrêté devant des « bouchons » successifs. Pour les faire sauter, il est indispensable de repérer avec précision les défenses ennemies et d’y appliquer une préparation d’artillerie avant que les tirailleurs ne se lancent à l’assaut. Grâce au cran à l’esprit de décision et au coup d’œil du Lieutenant Gien, les tirs d’artilleries, réglés dans les délais les plus courts, font rapidement tomber ces obstacles. Quatre villages sont enlevés, le bataillon avance de 20 kilomètres dans la journée.
Une violente contre-attaque sur le C.C.4 à Koenigsbach est repoussée le 6 avec de lourdes pertes pour l’ennemi (notamment 6 chars détruits). Grâce aux tirs bien ajustés du II/63, dirigés par son observateur, le Sous-Lieutenant Albier, le village est réoccupé et l’ennemi laisse entre nos mains plusieurs centaines de prisonniers. La veille, ce même détachement avait perdu son radio, le canonnier Guirot, en pénétrant avec les premiers éléments dans le village de Jöhlingen. Le 5ème R.T.M. occupe Muhlacker et Durrmenz le 7, créant ainsi une tête de pont au Sud-est de l’Enz. La partie de Pforzheim située au Nord de cette rivière est occupée le lendemain, mais les ponts sont coupés.
L’autre partie résistera encore deux jours et sera prise à revers le 10. Au cours de l’action contre cette ville, l’officier de liaison du II/63, le Lieutenant Poueyto, se tire avec avantage d’un duel peu banal. Son observatoire étant pris à partie par une batterie ennemie, il arrive à situer les pièces et à les réduire au silence en réglant sur elles le tir de son groupe. On apprendra, par des prisonniers évadés, que ce tir a valu à l’ennemi 8 tués, de nombreux blessés et deux pièces hors de combat. Mais aussi quelle n’est pas l’imprudence des Allemands de s’en prendre à l’observateur d’artillerie !
Dans un autre sous-Secteur, le 9 avril, le Lieutenant Vernier Palliez illustre, d’une manière peu usitée, les services qu’on peut attendre du Piper-Cub. Un escadron du 3ème R.S.M. se dirige sur Langenalb et les deux scout-cars de tête sont à cent mètres de la première maison. De son avion, Le Lieutenant Verniers Palliez alerte l’Officier de liaison d’artillerie auprès de l’Escadron. Sa voix se fait persuasive : « Attention, je vois de l’activité entre les deux premières maisons de Langenalb, à droite dans le sens de la marche. Ce doit être un Panzerfaust. Votre Scout-Car de tête ne le voit pas, car il est caché par la première maison. Qu’il s’arrête, il va se faire tirer sans pouvoir riposter. » Le Commandant de l’Escadron est prévenu, la colonne est stoppée. Les premiers Scout-Cars se replient à 400 mètres et un tir de 105 du III/63 est déclenché sur les maisons. Puis la colonne reprend sa marche et entre sans difficulté dans Langenalb. Le lendemain, le P.C du III/63 se porte dans la ville. Les deux maisons sont détruites. La fille d’un des deux propriétaires, dont le père git sous les décombres et dont la mère a été transportée à l’hôpital, raconte l’histoire en pleurant. Une pièce anti-char s’était installée là, malgré les supplications des habitants, peu envieux de recevoir les coups destinés aux militaires. Mais l’Officier qui commandait la pièce a compris, au repli des spahis, qu’un tir allait être déclenché : Il est parti précipitamment et les habitants ont fait les frais de l’opération.
Le 16 au soir, le Groupement Chapuis a atteint Klosterreichenbach, Erzgrube, Heselbronn, le Groupement Schloesser est à Ebershart, Neubulach et au Pont de Calw. Par une attaque de nuit, ce dernier Groupement s’empare de Nagold où tous les ponts sont intacts.
Le 17, le 3ème R.S.M. est arrêté devant Freudenstadt par une forte résistance. Un tir massif du IV/63 neutralise ce grand carrefour de route et c’est dans une ville en flammes que le 3ème R.S.M. fait son entrée. Le soir, la route Freudenstadt-Horb est entre nos mains.
Au cours de cette période, les Groupes de l’A.D./2 exécutent de nombreuses préparations sur des villages formant bouchons. Ils contribuent à arrêter les contre-attaques parfois très fortes. Mais surtout ils prennent à partie, à la demande des observateurs en Piper-Cub et des observateurs avancés, des armes automatiques, des mortiers, des automoteurs, des batteries, du personnel ou des véhicules qui s’enfuient, le beau temps a favorisé l’activité des avions, les services qu’ils ont rendus sont inappréciables. Les pilotes ont encore une fois montré leur virtuosité et un mépris du danger extraordinaire. Le 14 avril, le Piper-Cub du II/63, piloté par le Sous-Lieutenant Poulain et ayant à son bord le Lieutenant Perrin, observateur du groupe, est attaqué au-dessus de Waldrennach par 8 Focke-Wulf et arrive à s’échapper grâce à la maîtrise et au sang-froid de son pilote.