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1. Mise sur pied de l’A.D./2
 

Extrait de l’"Historique de l’artillerie de la 2° Division d’Infanterie Marocaine - 1942-1945"

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Mise sur pied de l’A.D./2

1er Avril 1943. - La 2ème D.I.M. est mise sur pied. Elle sera, huit mois plus tard, la première à reprendre en Europe la lutte contre l’Allemagne. S’il est difficile de prévoir dès ce moment l’honneur qui lui reviendra, il est certain qu’elle sera l’une des premières divisions engagées. Nombreux sont ceux qui, ayant vécu près de deux ans dans l’espoir de la revanche, sentent que c’est vers elle qu’il faut se diriger. Les demandes d’affectation, voire les intrigues, bien excusables, sont nombreuses.

C’est le Général Dody, commandant la région de Meknès, qui prend le commandement de la Division. Il ne se sépare pas de son Chef d’État-Major, le Colonel de Berchoux qui, pendant toute la campagne d’Italie, continuera à exercer ces fonctions.

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Général Dody

L’A.D./2 naît du 63ème Régiment d’Artillerie, dont elle garde l’écusson et les traditions. Son Chef, le Colonel Poydenot, n’a plus à gagner la confiance de ses subordonnés. Non seulement il a commandé le 63 et il y a laissé une empreinte ineffaçable, mais tous les artilleurs du Maroc lui ont voué leur admiration, et plus encore leur affection. Son autorité n’a d’égale que sa bienveillance. Plus d’hésitation possible : partir dans les premiers éléments, sous les ordres d’un tel Chef, n’est-ce pas là de quoi combler les vœux de l’artilleur le plus exigeant ? Mais le Colonel Poydenot est depuis Novembre 1943 chef de la liaison française auprès de le Vème Armée U.S. et ce n’est que le 5 Juin qu’il pourra rejoindre son A.D.

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Général de CA Poydenot (1951)

Le 63ème R.A.A. comprenait avant le 1er Avril :

  • Le I/63 (75 tractés) en Tunisie depuis fin Novembre (Chef d’ Escadron Jacquet-Francillon),
  • Le II/63 (65-75) à Taza (Chef d’Escadron Canioni),
  • Le III/63 - à Fès (Chef d’escadron Cazenave),
  • Le IV/63 (65-75) à Ouezzane (Chef d’Escadron Fabia),
  • Le V/63 ex G.A.A.M.L. (75 tractés) à Taza (Chef d’Escadron Lejay),
  • L’Artillerie de Position Fès (Capitaine Gasseng).

Les groupes de montagne forment l’Artillerie de la IVème D.M.M.

Quant à l’A.D./2, elle comprendra, conformément à la nouvelle formule de mise sur pied, qui supprime l’échelon Régiment, quatre groupes formant corps :

  • 3 groupes de 105 : le I/63, le II/63, le III/63,
  • 1 groupe de 155 : le IV/63.

L’ex G.A.A.M.L. - V/63 et l’ancien II/63 fournissent les noyaux des IIème, IIIème et IVème groupes. Quant au I/63, il est déjà sur pied, car il a participé à la campagne de Tunisie et écrit la première page de gloire. Bien que l’A.D./2 ne fût pas encore constituée à l’époque, elle s’enorgueillit et elle s’enrichit des exploits de ses enfants. Il est donc légitime de faire commencer l’histoire de l’A.D./2 à l’engagement du 1er groupe sur le théâtre tunisien et d’en retracer ici les plus brillants épisodes.

Le I/63 en Tunisie.

Commandé par le Chef d’Escadron Jacquet-Francillon, le I/63 doté de 75 à pneus et de tracteurs Dodge, est intégré le 5 Décembre 1942 dans la Première Division de Marche Marocaine (1ère D.M.M.).

Le Général Mathenet commande la Division, le Colonel Eon l’artillerie. Celle-ci comprend deux groupes : le I/63 et le III/64.

Le I/63 fait mouvement par voie de terre le 21 Décembre 1942 et arrive à Bou-Arada le 2 Janvier 1943. La 2ème batterie du I/63 reçoit une mission d’appui du 4ème Spahis Tunisien au Djebel Mansour. Elle la conservera jusqu’au 6 Janvier. L’État-Major, la 1ère batterie, le 3ème Batterie et la C.R. prennent position à Bou-Arada pour appuyer le Sous-Groupement Ouest au commandement du Colonel Schmeltz (4ème Spahis Tunisiens). Le groupe conserve cette mission jusqu’au 15 Janvier 1943 exécutant durant cette période de nombreux tirs à vue sur les organisations ennemies de Pont du Fahs.

Le 15 Janvier, le Chef d’Escadron Jacquet-Francillon est détaché à l’Armée Américaine. Le Capitaine Pressard Louis prend le commandement du groupe.

Le 16 janvier, l’État-Major, la 1ère Batterie, et la C.R. rejoignent la 2ème Batterie au N.O. du Djebel Chirich. Chaque Batterie appuie un bataillon du 7ème R.T.M.

L’ennemi tâte sans arrêt notre dispositif et les tirs d’artillerie sont fréquents et variés. L’Armée allemande a besoin de « s’aérer » et lance sur le 1ère D.M.M. une puissante formation blindée. Les journées des 18, 19 et 20 Janvier sont particulièrement néfastes pour notre infanterie et notre artillerie qui résistent magnifiquement malgré les moyens insuffisants en qualité et en quantité. Les pertes sont sensibles et il faut céder du terrain. Le groupe du 64ème R.A.A. et la 1ère Batterie du 63ème R.A.A. adossés à la montagne, sans issue, sont écrasés par les chars Tigre ; le matériel doit être mis hors de combat. L’État-Major et la 1ère Batterie ont de grosses pertes. Le Capitaine Pressard Louis, commandant le groupe, disparaît au cours du combat, légèrement blessé, cerné de toutes parts, fait prisonnier ainsi que le Chef d’Escadron Janique commandant le groupe du 64ème R.A.A.

La 2éme Batterie reçoit également le choc des blindés. Le Capitaine Prévost est grièvement blessé et remplacé par le Lieutenant de Valence. Une pièce est perdue en anti-char. La batterie se porte le 20 en position au Nord-Ouest de Sodga.

La 3éme Batterie reçoit le 19 la mission de continuer avec le 9ème R.T.A. un bouchon au N.O. d’Ousseltia pour arrêter la progression des blindés allemands. Les combats sont durs. L’unité éprouve des pertes en personnel et laisse sur le terrain une pièce détruite par un char allemand. La 3ème Batterie est citée à l’ordre de l’Armée.

Le 23 janvier, le Capitaine Pressard Adrien prend le commandement du groupe à deux batteries.

À cette date, la 1ère D.I.M. s’installe sur la défensive et le I/63, en position dans la région de la Ferme Sodga (Djebel Bargou), appuie tour à tour le 7ème R.T.M., les Goumiers (51-62 Goums), le 29ème R.T.A. (3ème bataillon) participant à des actions locales (patrouilles lointaines, coups de mains, etc...) et exécutant des tirs à vue, des tirs d’interdiction et de harcèlement. La 2ème Batterie du I/63 se met en position à Sodga de façon à pouvoir agir dans la plaine d’Ousseltia au pied du Djebel Serdj et Djebel Guitoune.

Elle conservera cette mission jusqu’au 9 Avril. Le reste du groupe se porte à la Zouia Sidi Mélek en liaison avec le 1er R.E.C.

L’État-Major, la 3ème Batterie et la C.R. prennent position le 15 mars dans la région de Bou-Arada sous les ordres du Colonel Besançon, commandant l’Artillerie du secteur. Le I/63 appuie le I/15ème R.T.S. et un bataillon du 6ème R.T.A. et exécute jusqu’au 2 avril de nombreux tirs d’accompagnement de patrouilles, et des tirs de représailles sur le Djebel Mansour fortement occupé par les Allemands. Toutes les attaques locales lancées sur nos positions sont stoppées par les tirs d’arrêt.

Le Chef d’Escadron Jacquet-Francillon, qui avait rejoint son groupe le 15 mars, est blessé et évacué le 17.

Le 10 avril, la 9ème batterie du 64ème R.A.A. est rattachée au I/63. Le groupe à 3 batteries, commandé par le Capitaine Pressard Adrien, appuie le 6ème R.T.A.

L’offensive qui se développe à cette date en Tunisie laisse prévoir à brève échéance la reprise du mouvement en avant. L’activité s’accroît dans le secteur en vue d’obtenir le maximum de renseignements et de faire des prisonniers. Le groupe participe à tous ces coups de mains de va et vient et reçoit les félicitations du Colonel Calderou commandant le 6ème R.T.A. pour ses appuis de feux remarquables. Le 17 Avril, l’attaque de « l’As de Trèfle », piton important pour les opérations futures, est appuyée par le I/63. L’opération réussit parfaitement. La garnison est décimée (72 prisonniers).

À partir du 21 les troupes se préparent à la grande offensive. La 1ère D.M.M. exécutera une attaque en direction de Pont du Fahs, suivie d’une exploitation en direction de Tunis.

L’attaque générale menée par le 6ème R.T.A., le 2ème R.T.A. et le 15ème R.T.S. a lieu le 25. Le groupement d’Artillerie (I/63 - II/66 - III/62 - I/62) est chargé de l’appui direct ; l’ennemi, écrasé par nos tirs, serré de près par notre infanterie mordante, cède le terrain. Le Djebel Alliliga et le Djebel Mansour, qui commandent la plaine, tombent entre nos mains. Jusqu’au 30 avril, le groupe participe aux combats particulièrement sévères de Djebel Assar et du Pénitencier de Djougar.

Le 4 mai, le I/63 est chargé de l’appui direct du 3ème R.E.I. qui attaque en direction de Dra Ben Saidane, maison fermière de Loukanda. Ses tirs sont particulièrement heureux. Plusieurs contre-attaques sont stoppées par des tirs à vue qui causent de grosses pertes chez l’ennemi, contraint de se replier. Les batteries ont tiré chacune 1.500 coups environ dans cette seule journée.

Le 6 mai, le I/63 passe à l’appui direct du 7ème R.T.M. commandé par le Colonel Carpentier. Sa mission est d’attaquer sans relâche toutes les résistances repérées, de manière à maintenir chez l’ennemi un état constant d’inquiétude. La progression continue et les combats prennent fin le 2 [1] mai à 15h30 devant la ville de Zagouhan.

Le 20 mai, le groupe participe au défilé de Tunis. Il quitte la Tunisie le 25 pour rentrer au Maroc et s’équiper en matériel moderne.

Les pertes s’élèvent à :

  • 9 tués,
  • 18 blessés,
  • 66 disparus.

Outre la citation collective de la 3ème Batterie, 83 citations individuelles dont 7 à l’ordre de l’Armée ont été décernées.

Le Colonel Besançon, qui a eu le I/63 sous ses ordres pour les opérations du Mansour et du Zagouhan, s’exprime en ces termes dans son ordre particulier du 15 mai 1943 :

« Il adresse en particulier ses félicitations au groupe du 67ème R.A.A. et au 1er groupe du 63ème R.A.A. pour l’aide particulièrement efficace qu’ils n’ont cessé d’apporter à l’infanterie par la précision et la rapidité de leurs interventions : résultat qui n’a été obtenu que grâce à la volonté tenace de chacun d’assurer la liaison la plus complète avec les groupes appuyés et de leur donner en toutes circonstances et quel qu’en soit le prix le maximum d’appui. Le 67ème R.A.A. et le I/63ème R.A.A. ont ainsi donné toute la mesure de la valeur de leurs cadres, des qualités techniques de leur personnel et de la camaraderie de combat qui les anime ».

Perception du matériel de l’A.D./2.

La mise sur pied de l’A.D./2 paraît se réduire à une question de personnel, le matériel devant être fourni en totalité par les Américains.

Mais le problème est beaucoup moins simple. La perception du matériel s’effectue fragmentairement. Il faut la suivre dans les détails, réclamer la dotation la plus urgente pour l’instruction, répartir entre les groupes le matériel perçu. Et lorsque la Division s’embarquera pour l’Italie, les déficits seront encore sensibles. Mais chacun réussira, à force d’ingéniosité, à y remédier.

Le 13 juillet, la Division quitte Meknès pour la région de Martimprey du Kiss, à la frontière Algéro-marocaine.

Les manœuvres d’ensemble, les Écoles à feu qui s’y déroulent, les exercices d’embarquement en Oranie, destinés à donner aux unités la cohésion qui leur manquait encore, sont interprétés comme un signe de départ prochain. L’impatience s’accroît.

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[1] date effective mentionnée sur le document original. Il s’agirait plus vraisemblablement du 12 mai


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