[1]
Dès 1917, René Baillaud [2], lieutenant du Génie, utilise les propriétés du réflecteur parabolique pour son détecteur d’avions. Dans un premier temps, il conserve le principe du goniomètre acoustique : des réflecteurs de 2 mètres de diamètre couplés 2 par 2, pour le site et l’azimut. Le système est encombrant et il imagine un seul réflecteur et quatre cornets récepteurs. Il présente en 1917, au commandant Pagésy, son paraboloïde qui utilise le principe de l’écoute mono-auriculaire alternée. Le Larousse du XXème siècle de 1932 en donne la définition suivante : « Appareil employé dans le tir au son de l’artillerie de défense contre aéronefs pour déterminer la position d’un avion non visible dont on entend le bruit du moteur. »
Après des essais à Arnouville [3], le détecteur est commandé fin juillet 1917 à 50 exemplaires. Le réflecteur parabolique concentre en un même point les ondes sonores qui arrivent parallèlement à son axe. Avec un réflecteur de 3 m de diamètre, l’opérateur arrive à entendre (de nuit et par temps chaud) un avion volant à une douzaine de kilomètres (la distance nominale d’écoute est de 8 km). Le matériel est servi par un opérateur d’azimut et un de site donne des éléments précis à 2 ou 3 degrés. Le paraboloïde est le plus performant des appareils de détection en service : il n’entend pas les bruits qui sont à plus de 20° ou 30° de son axe de recherche et il n’est pas sensible au vent. Il arrive à discriminer deux avions, dont les positions sont à 200 à 300 millièmes l’une de l’autre. Des paraboloïdes de 2 et 3 mètres sont fabriqués. Le réflecteur ou miroir en staff [4] monté sur un treillis à maille fine est ripoliné [5].
Une commande de 50 nouveaux paraboloïdes équipés d’un altitraceur est faite en décembre 1917. Rapidement le Grand Quartier Général qui pense que ces moyens sont insuffisants va passer d’autres commandes pour arriver à un total de 460 paraboloïdes répartis entre :
Les premiers paraboloïdes sortent en février 1918, mais à l’Armistice seuls 93 sont en service aux Armées. L’effort est mis sur le C.R.P. dont l’artillerie antiaérienne, qui est plus une artillerie de nuit, est équipée de 32 paraboloïdes à la date du 31 mai 1918, et de 106 le 27 septembre de la même année. Début 1918, le lieutenant-colonel Pagézy demande la création d’un cours d’écoute pour les servants de paraboloïdes. Celui-ci, créé à Dugny (au nord du Bourget) et dépendant d’Arnouville, est commandé par le lieutenant Baillaud.
Sur certains paraboloïdes, un simple écran acoustique séparant les cornets de réception du paraboloïde va permettre aux opérateurs, d’utiliser la technique de l’écoute binauriculaire, et non l’écoute mono-auriculaire alternée.
La portée du paraboloïde est importante : 9000 mètres et jusqu’à 13000 mètres pour un avion volant à une altitude de 3000 mètres (si la transparence acoustique est bonne) [6].
Ce moyen d’écoute est efficace, car l’artillerie antiaérienne du C.R.P. gêne considérablement les raids ennemis sur Paris.
Dès la fin de la guerre de 14-18, l’artillerie antiaérienne a besoin de matériels d’écoute plus compacts et plus précis, mais les paraboloïdes de 3 mètres sont conservés. En 1939, des paraboloïdes fixes de type A, B, ainsi que des paraboloïdes montés sur remorque de type B et C, sont toujours en service.
[1] Source : « La D.C.A. de ses origines au 11 novembre 1918 » par le chef d’escadron Lucas 1932.
[2] Baillaud astronome à l’observatoire de Toulouse est affecté à la D.C.A. du C.R.P.
[3] Par arrêté ministériel du 28 juin 1915 le Centre d’instruction de tir contre aéronefs d’Arnouville les Gonesse est créé à l’initiative du capitaine Paris. En 1916, il devient le Cours pratique de tirs contre objectifs aériens.
[4] Matériau composé de plâtre armé d’une toile (lin, jute, sisal...).
[5] A l’origine le ripolin est une peinture laquée très résistante, à base d’huile de lin, qui donne un aspect brillant.
[6] Source : « Instruction provisoire sur le tir de l’artillerie de D.C.A.- Tome II - Le tir sur avion entendu » 1939.