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5- Description d’un système d’arme moderne.
 

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Article du général (2s) Jean-Pierre Bariller, président du comité de pilotage du musée de l’artillerie, dans sa quête de fil conducteur pour comprendre l’artillerie dans son évolution au travers des siècles.

Un système d’arme moderne dispose de tous les éléments qui lui donnent la capacité à réagir vite et efficacement. [1].

Pour donner une approche globale de la notion de systèmes, nous allons prendre une démarche vectorielle.

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Les types de lanceurs constituent le premier espace vectoriel : on y trouve des canons, des rampes, des affûts. -*Les canons se distinguent en sous-familles, comme le calibre, le domaine d’emploi (sol-sol, sol-air, antichar).

  • Les rampes peuvent servir à lancer des roquettes, des missiles, des aéronefs : pour chaque projectile la rampe est spécifique.
  • Les affûts sont aussi différents selon qu’ils servent de support aux armes de petits et gros calibres ou aux missiles (de différente nature également).

Les lanceurs utilisent des supports différents pour leur mobilité. Ils peuvent être autonomes s’ils sont motorisés (terrestre ou aérien), ils peuvent aussi être tractés sur des remorques tirés par la force animale ou mécanique, ou tout simplement portés, voire héliportés ou aérotransportés).

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Les munitions ou projectiles sont le deuxième espace vectoriel.

  • Les obus aux effets différenciés (explosifs, incendiaires, fumigènes, éclairants, antichar), dans tous les calibres, auxquels s’ajoutent les différents conteneurs de poudre : douille en métal, douille auto-combustible, gargousses (sacs de toile contenant la poudre et livrées avec étoupilles pour la mise à feu) ; sans omettre la fusée de tête qui permet de maîtriser le mode d’éclatement de l’obus, donc qui a aussi toute une famille de produits(percutante, fusante, pénétrante à court retard, à influence etc.).
  • Les roquettes, de tailles diverses, pouvant elles-mêmes transporter des sous-munitions, de type classique ou nucléaire.
  • Les missiles, porteurs de charges militaires (classiques ou nucléaires), ou non car consacrés à des missions de surveillance, de relais transmissions ou de brouillage(drones rapides) ; ils se diversifient encore selon le mode de pilotage (vol programmé, télé pilotage - selon des modes différents adaptés aux types d’objectifs ciblés).
  • Autres aéronefs, du type mini avions, et remplissant des missions également différenciées mais souvent identiques à celles des missiles.

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Les senseurs chargés de détecter les objectifs sont aussi de natures variées, ils constituent par conséquent un autre espace vectoriel. Ils utilisent un ou plusieurs modes de détection (visuel, optique, électromagnétique, infra rouge, acoustique, sismique) qui vont bien au-delà des possibilités des sens humains (ouïe, écoute, odorat, toucher), qui gardent quand même leur utilité. Ces senseurs peuvent être fixes ou mobiles, terrestres ou aéroportés.

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Puis autour des lanceurs et des senseurs, il faut réaliser tout un environnement de moyens techniques pour en optimiser la mise en œuvre.

  • D’abord des moyens de se situer dans l’espace (localisation et orientation) grâce à des outils mis au point en cartographie, topographie etc...
  • Puis les moyens d’évaluer les perturbations générées sur les trajectoires par les conditions météorologiques (sondage préalable au lancement, pour les obus et roquettes, correcteurs de trajectoires pour les autres).
  • Les engins de mesure de l’usure des canons et de la tare des poudres pour en évaluer la variation de la vitesse initiale réelle du projectile et rectifier en conséquence avant le lancement effectif.
  • Les moyens de déterminer les éléments ou ordres de départ, grâce à des abaques, tables, moyens de graphiquage ou calculatrices.

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  • Des moyens humains sont importants pour mettre en œuvre toutes les tâches qui découlent des facteurs qui viennent d’être énumérés. Mais il faut aussi garantir une qualité exigée des techniques. Il faut donc une main d’œuvre très spécialisée (formation) et entraînée (simulateurs).

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  • Des moyens de communications sont nécessaires entre tous les acteurs. En partant de la voix, on aboutit à la transmissions de données, en passant par la téléphonie, la télégraphie et la radio, selon l’époque. Les dernières nouveautés exigeront même le dialogue entre les systèmes pour l’échange automatique des données. Les ordinateurs apporteront de plus en plus la solution aux tâches répétitives, dont l’extraction de l’intervention humaine réduit énormément les délais et les fautes. Ils autoriseront aussi une concentration des systèmes sur les mêms objectifs. On peut alors parler de système de systèmes...

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Enfin les effets produits sur l’objectif (observation, brouillage, destruction, neutralisation, harcèlement etc.), constituent encore un espace vectoriel. Ils sont l’aboutissement d’une combinaison adaptée de tous les espaces vectoriels précédents.

En conclusion, la complexité croissante du métier d’artilleur est simplifiée par cette démarche vectorielle qui consiste à étudier et à mettre en œuvre les nouveaux matériels dans une démarche globale et complète. Pour aussi ardue qu’elle paraît, elle se concrétise par une chaîne de compétence et de cohérence qui implique tous les acteurs. C’est peut-être cela le côté sérieux de l’artilleur.

[1] Seule la durée de trajet est incompressible, mais est différente selon que l’on utilise des obus, des roquettes, des missiles, dont les trajectoires différent. L’obus suit une trajectoire balistique, la roquette à une phase de propulsion qui se prolonge au delà de la sortie du lanceur, et se termine par une phases balistique. Le missile à une propulsion, puis une phase de navigation plus ou moins longue, pour (éventuellement) se terminer par une phase balistique. Les missiles antiaériens, par exemple, peuvent atteindre leurs objectifs au cours des deux premières phases.


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