Histoire de l’Artillerie, subdivisions et composantes. > 2- Histoire des composantes de l’artillerie > L’artillerie du Repérage et de l’Acquisition : renseignement d’artillerie. > 0- Historique du Repérage > I- Les origines du Repérage > 1918-1939 - Perfectionnement du Repérage > 1 . Les résultats obtenus au cours de la première guerre mondiale >
a. Complémentarité des méthodes
 

Les deux méthodes se révèlent assez complémentaires et assurent une permanence du repérage dans pratiquement n’importe quelle circonstance. En effet, SRS et SROT ne sont pas confrontés aux mêmes limitations.

Les conditions physiques n’influent pas de la même manière sur les deux méthodes de repérage. Ainsi, le brouillard gène considérablement le repérage par observation, rendant imprécises ou même invisibles les fumées et les lueurs. Il réunit cependant les conditions optimales à une bonne observation par le son : vent nul, température et hygrométrie constantes. A l’inverse, de nombreux éléments modifient la propagation du son : les discontinuités topographiques (vallées, collines, etc.), les étendues d’eau, les variations thermiques ou hygrométriques trop rapides rendent le repérage par le son aléatoire alors qu’elles n’ont aucune répercussion sur l’observation à vue. Seul le vent perturbe tous les repéreurs. Au-delà d’une vitesse de 5 m/s, il perturbe la propagation de l’onde sonore et en cas de variations d’intensité, il oblige à réviser sans cesse les corrections lors de l’exploitation des données. De plus, il disperse les fumées émises par les tirs.

L’emploi des deux méthodes permet de déjouer les tentatives de camouflage. Celles-ci se multiplient au cours de la guerre, en réponse au succès du repérage. Elles visent surtout à limiter l’efficacité de l’observation visuelle. Les artilleurs disposent de « marrons à lueurs » qui sont en fait des leurres émettant une fumée et une lueur semblables à celles d’un coup de canon. Des repéreurs entraînés arrivent néanmoins à discerner les « marrons » des vraies lueurs de tir qui développent une auréole beaucoup plus nette. L’emploi de sachets anti-lueurs pose plus de problèmes. Ces artifices diminuent la température des gaz à la sortie de la pièce et donc leur ré inflammation, responsable des lueurs de départ et de l’onde de bouche. Esclangon découvre le premier cette relation et conseille lui-même l’utilisation de ces produits chimiques. D’autres dispositifs arrivent à gêner les deux repérages à la fois. Les artilleurs adverses comprennent vite que le rendement des sections diminue lorsque le tir est très intense. Ils généralisent donc les tirs simultanés de plusieurs batteries qui obligent les SROT à multiplier leurs recoupements pour éviter les confusions. Les SRS en souffrent également. Il est normalement impossible de camoufler le bruit d’une batterie par le bruit d’une autre car, compte tenu de la vitesse du son et la sensibilité des appareils enregistreurs- la confusion n’est possible que si ces batteries se trouvent à moins de soixante-dix mètres des postes. Néanmoins, la multiplicité des tirs peut « affoler » les styles de l’oscillographe et rendre les bandes illisibles.

Une dernière technique consiste non pas à empêcher le repérage mais à le rendre caduc par l’emploi d’unités nomades qui ne tirent pas longtemps, changent d’emplacement après chaque tir et peuvent s’installer dans des emplacements préétablis. La transmission des coordonnées du central au service de renseignement et la préparation des tirs de contrebatterie laissent largement le temps à ces unités de changer de position. Pour parer ces moyens de camouflage qui touchent les uns ou les autres, SROT et SRS doivent rester en liaison constante et apprendre à échanger leurs informations. Dans certains cas, seule une collaboration étroite garantit la fiabilité d’une détermination.

La complémentarité des deux systèmes s’exerce aussi au niveau de leur mise en œuvre. Les SROT bénéficient d’un temps d’installation réduit. Les postes d’observation avancés sont établis en priorité et fournissent les premières informations dans un délai très court. Leur organisation progresse et le réglage de leur matériel permet ensuite une plus grande précision. Les SRS, à l’inverse, demandent plus de temps pour être opérationnelles. Les directives, dictées au cours de la guerre ne donnent pas d’estimation de délai mais l’installation des microphones nécessite des opérations topographiques très précises, des réglages plus ou moins longs et des liaisons complexes.

Les repéreurs doivent connaître en permanence les conditions atmosphériques, dont les variations influent sur la propagation du son, d’où l’emploi de nombreux instruments météorologiques pour les corrections d’hygrométrie, de température, de vent ... La décision d’implanter une SRS ne répond donc pas à une urgence mais plutôt à un besoin de précision ou de confirmation. Le repérage par le son apporte en effet la preuve absolue de l’occupation d’un emplacement, contrairement aux SROT qui peuvent être « leurrées ». De plus, il fournit des indications sur le calibre de la pièce adverse par l’étude de l’onde de choc.


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Base documentaire des Artilleurs