Quel est le rôle réservé à toute cette organisation dans la guerre future ?
L’avenir des organes de repérage est intimement lié aux progrès que pourra réaliser l’artillerie. Ces progrès sont de deux sortes :
Les uns et les autres intéressent les organes de repérage.
Pendant la guerre, l’Artillerie a de plus en plus recherché la suppression des phénomènes optiques accompagnant le départ du projectile. Les lueurs étaient en partie supprimées. Des expériences intéressantes avaient été entreprises pour la suppression des fumées. Si elles n’avaient pas complètement abouti, du moins est-on en droit d’admettre qu’elles seront reprises avec succès ; on peut affirmer qu’aucun des phénomènes, lueurs ou fumées, ne subsistera dans la prochaine guerre.
Pour l’instant, il ne semble pas possible de supprimer les phénomènes acoustiques accompagnant le départ du coup de canon.
En résumé, nous pourrons conclure que les batteries d’artillerie auront de plus en plus tendance à tirer, sans réglage préalable, sur des objectifs éloignés, invisibles des observatoires terrestres, pourvu que ces objectifs aient par rapport à ces batteries une position relativement connue. Donc à la base de tout, il faut une organisation topographique précise. Mais cette organisation n’étant possible que sur le territoire français, et encore au prix de travaux très longs et très onéreux, il faudra se contenter de prévoir, dès le temps de paix, la mobilisation des G.C.T.A chargés de l’établissement rapide des plans directeurs.
Le rôle des S.R.O.T., au point de vue de la recherche des batteries ennemies, sera de plus en plus réduit pour les raisons exposées plus haut. Mais toutefois des organes conserveront toute leur valeur pour la surveillance du champ de bataille d’infanterie.
Le rôle des S.R.S. sera au contraire prépondérant. Mais il leur faudra posséder des appareils robustes, précis, sensibles, s’adaptant à toutes les conditions de la guerre, en stabilisation et en mouvement. Quelle est la valeur actuelle du matériel ? Le matériel T.M. est robuste, suffisamment sensible et précis, compte tenu des conditions de la guerre de la fin de 1918. Mais répondra-t-il aux exigences de la prochaine guerre ? Il est permis d’en douter. Il faudra sans doute augmenter sa sensibilité ; de plus, il nécessite un développement considérable de lignes téléphoniques. A ce dernier point de vue, les appareils à petite base seraient plus appropriés à la guerre de mouvement, mais leur emploi se heurte à des difficultés techniques, que quelques savants éminents prétendent insurmontables. Comme on le voit, le problème est loin d’être résolu. Mais, si on se reporte à quelques années en arrière et que l’on constate les progrès accomplis, on est rempli d’admiration pour les savants qui, malgré le peu de faveur que leur méthode rencontrait chez quelques artilleurs, ont continué leurs patientes recherches et sont arrivés à nous doter des appareils actuels. L’effort accompli pendant la guerre sera maintenu en temps de paix et on est en droit de former les plus grands espoirs dans la solution du problème.
Il est probable que l’on fera appel dès le temps de paix à la photographie aérienne pour l’établissement de la révision des cartes. Les progrès dans cette branche se manifesteront donc, sous des formes multiples (construction d’appareils stéréoscopiques et à prise de vues rapide, détermination plus exacte de l’altitude et par suite de l’échelle).
Il sera nécessaire de faire, dès le temps de paix, l’instruction de Chefs de S.R.A. à la mobilisation. Ces officiers devront être recrutés parmi les officiers d’artillerie, très au courant de la technique de cette Arme, connaissant par suite, très exactement, la nature des renseignements à fournir. Ces officiers devront de plus posséder parfaitement le fonctionnement des différents organes de repérage, savoir lire et interpréter une photographie aérienne. Leur instruction sera difficile. Rarement, ils auront l’occasion de travailler dans des conditions analogues à celles de la guerre. Il leur faudra vaincre ces difficultés par un travail personnel qui leur permettra d’acquérir rapidement, à la mobilisation, l’expérience nécessaire au bon fonctionnement de leur service qui, de plus en plus, devra être considéré comme un des plus importants de l’artillerie en campagne.
28 janvier 1920, PELLION